Sardines à l'huile au combava, souskaï de mangue sable
Nous sommes le samedi 21 juin, jour de la fête de la musique, Gracianne et Estèbe nous ont demandé de musicaliser nos blogs et de publier précisément à cette date, dont acte. C'est une idée que je trouve excellente, même si pour moi c'est tous les jours la fête de la musique. Si le son vous dérange (cet accordéon est en effet horripilant), vous pouvez le couper en cliquant sur la barrette du mini-lecteur, ou en appuyant sur la touche ad-hoc de votre clavier, voire en vous munissant d'un solide marteau... à la Claude François (...chère Camille).
(Edit : Afin que cette musique ne se déclenche pas pour les billets suivants, j'ai annulé la lecture automatique, maintenant c'est pour entendre qu'il vous faut cliquer sur le triangle!)
La musique de fond mériterait d'être noyée
J'aime la musique depuis toujours, j'en écoute presque tous les jours, j'en ai joué il fut un temps, avec une Fender à grosses cordes qui faisait bouger les bibelots dans les vitrines de l'antiquaire qui louait à vil prix sa cave pour nos répétitions, il a fini par nous virer et ce fut la fin d'une carrière à la Paul Simonon. Il y a un piano à la maison, que je malmène de temps à autres, j'ai souvent des percussions dans la tête, j'adore danser avec furie, longtemps, extatique et suant l'alcool ingurgité peu avant. Bref, j'adore la musique et j'aime qu'on la respecte.
Ainsi, je suis allergique à la musique dite d'ambiance, c'est une horreur, on ne peut plus entrer dans un magasin, un parking, un ascenseur voire un restaurant (où cela devient hélas de plus en plus fréquent) sans un fond musical à en faire pleurer les fesses les plus étanches. Les pires endroits, ce sont ces boutiques de fringues où il est impossible de demander une info sans se munir d'un porte-voix et d'un cornet acoustique pour échanger quelques bribes avec des vendeurs traumatisés des oreilles.
Les musiques de lounges, genre Buddha Bar ou autres me font l'effet d'une bouillie sucrée, écoeurante dès qu'elle est un peu épaisse. D'ailleurs, je n'y vais plus que rarement dans ces endroits. Déjà, lorsque j'étais lycéen, je quittais le troquet du coin dès qu'un facheux mettait une pièce dans le juke-box; oui, oui, même en pleine partie de baby-foot amoureux ou avec une provision de parties claquées au flip, je m'enfuyais sans panache, abandonné dans mon tango panaché.
Dans les avions aussi, quelle engeance ces ritournelles lénifiantes qu'ils estiment désormais nécessaire de nous infliger au décollage et à l'atterrissage, dans le but de nous détendre. Elles me crispent au contraire, je n'ai pas peur en avion, mais l'idée de m'écraser avec dans les oreilles une sous-musique imposée m'est insupportable. Je place alors mes écouteurs personnels dans mes conduits auditifs, pour un doux The Dô ou un Plain White T's très sec. Hélas, j'ai beau le faire discrètement, il se trouve presque toujours une harpie déguisée en hôtesse qui me les arrache en glapissant que "l'utilisation de tout matériel électronique, etc.", vous la connaissez, je suppose?
Je n'aime pas les sites ou les blogs sonorisés comme le parking ou la supérette du coin. Lorsque je veux écouter de la musique sur Internet, je vais sur Deezer, sur U-Tube etc.. J''y vais de mon plein gré et je sais à peu près ce que j'y cherche. Mais dès que je tombe sur un site ou un blog avec un fond musical, je clique aussitôt dans la petite croix en haut et à droite de l'écran. Cette irruption dans ma sphère privée d'une musique pas forcément appréciée, en tous cas non sollicitée, est une forme larvée d'agression physique.
J'écoute parfois de la musique lorsque je me balade sur Internet, et de l'entendre tout à coup brouillée par cette intrusion m'énerve beaucoup. Je surfe le plus souvent en silence, afin de ne ne pas déranger ceux qui travaillent ou dorment à proximité. Je cache ma joie quand tout à coup, un DJ virtuel ramène sa soupe dans ma tranquillité. Il n'y a ainsi aucun blog musical dans la liste de ceux que je suis plus ou moins régulièrement, à une ou deux exceptions près, pour lesquelles le plaisir de la lecture l'emporte sur le réflexe de devoir préventivement couper le son, geste devenu quasi plavlovien avec le temps.
Un jour une indispensable amie que je vais régulièrement lire, bien que son blog fasse pouet-pouet, m'a dit à peu près : "J'ai pensé à toi, j'ai mis Melody Nelson dans ma play-list". Merde, mon Gainsbarre en musique d'arrière-plan, décidément elle ne m'épargnera rien ... Il y a quelques jours également, je déjeunais avec une autre amie blogueuse et lui confiais que j'allai m'associer à cet évènement culino-musical; elle m'a demandé comme une évidence "Tu vas nous passer du Gainsbourg?". Certes non, plutôt crever, mignonne allons à Saragosse voir cirrhose est éclose, mon culinaire n'est pas un mange-disque et je n'ai pas le tympan périodique.
Je souffre en silence de la musique des rues commerçantes, de ces haut-parleurs qui semblent installés à demeure sur certaines places de village, à commencer par celle de Lannilis (Nord Finistère), où il semble fondamental pour plaire aux chalands, de leur déverser dans les oreilles les monstrueux braiements de radio-locales qui sentent le pâté. Assez hauts également sur mon échelle de l'horreur, mais heureusement souvent furtifs, se placent ces décérébrés qui passent en voiture musique à fond et toutes vitres ouvertes. Si j'ai perdu presque tous les points de mon permis, c'est à force de ne plus tolérer d'être arrêté à un feu rouge en leur compagnie.
Comme toutes ces journées affectées, dans les deux sens du terme (journée de la femme, journée du souvenir, journée de la terre, journée du hamster épilé de ma cousine), la fête de la musique m'inspire au mieux de l'indifférence : j'évite de sortir de chez moi ce jour là. La musique, c'est comme le vin, la table et tous ces plaisirs d'esthète ou d'épicurien, il faut les déguster comme on l'entend, ne pas faire de mélanges incongrus et indigestes, ne pas être passif. Se balader dans une ville, voire en pleine campagne un jour de fête de la musique, c'est s'exposer à une orgie de notes et boucan, à une diarrhée cacophonique.
Du coup, vous vous demandez sans doute pourquoi, alors que je n'aime ni la ritournelle sur les sites, ni la fête de la musique, je sonorise mon blog ce 21 juin. La raison est que, outre le fait que je souhaite sincèrement faire plaisir à Gracianne et Estèbe (mine de rien, j'ai bon fond), d'une part c'est l'occasion de donner mon avis sur les blogs Bontempi, et d'autre part je n'ai pas choisi n'importe quelle musique.
Je n'aime pas les chansons de marin
Ou plutôt les pseudo chansons de marin, reconnaissez que celle que je diffuse, pourtant bien en phase avec la recette de fin de billet, tape particulièrement sur les nerfs. Rien à voir avec une chanson de marin d'ailleurs, plutôt une chanson grivoise de corps de garde, je ne l'ai pas trouvée autrement que dans la version édulcorée que vous entendez, mais si vous tenez à briller dans les réunions de potaches, voici les paroles originales, enfants, âmes pures et gens de goût, sautez la partie en italique, quant aux autres sautez ce que vous voulez, même un repas si cela vous ...chante.
"Ils étaient deux amants, Qui s’aimaient tendrement,
Qui voulaient voyager,Mais ne savaient comment, a-a-a-a-
Allons à Messine, Pêcher la sardine, Allons à Lorient, Pêcher le hareng,
Qui voulaient voyager
Mais ne savaient comment,
Et le vit dit au con:
"Tu seras bâtiment"
Je serai le grand mât
Que l'on plante dedans,
Mon rouston de droite
Sera commandant,
Mon rouston de gauche
Sera lieutenant,
Les poils de mon cul
Seront les haubans,
Les morpions que j'ai
Y grimperont dedans,
Et la peau de mes couilles
Fera voile au vent,
Le trou de mon cul
Soufflera dedans,
Sacré nom de dieu,
Ça puera bougrement ! "
Ne me remerciez pas pour ce délicat moment de fraîcheur, je déteste encore plus les chansons paillardes que les pseudo chants de marins, qui ne sont que flonflon et musette pour attirer les badauds à la kermesse du port. Les marins chantaient peu, ou alors des cantiques.
Certes, les manoeuvres étaient parfois accompagnées par des antiennes, une façon de dire "ho-hisse" de manière à la fois rimée et rythmée. Tout le reste n'est que folklore .
Le monde du silence? Laissez moi rire!
Le Monde du Silence, même les moins téléphages d'entre-vous connaissent le livre et les émissions du Commandant béret rouge Cousteau. C'est un peu la rançon de tous ces pionniers de la plongée, en scaphandre comme en sous-marins, ils ont les tympans abimés par la pression. Il y a du bruit dans la mer, entre les grattement de carapaces et chocs de pierres roulées (Rolling Stones) voire les grognements de certains poissons, comme le grondin ou le saint pierre.
Il existe sous les mers des formation de rock basiques, les meilleures selon moi. A la guitare, la raie guitare, à la basse, le sea-bass, et à la batterie, le crabe tambour (il existe bien un poisson nommé freshwater drum, mais il vit en eau douce, le cuistre...).
Ce n'est pas lui le crabe tambour,
mais Dufilho dans ce film est excellent.
Et puis, j'allais oublier la musique sur les plages, les hauts parleurs de l'animation ou la radio du tas gluant d'érythèmes avachi sur sa serviette RTL. On devrait en noyer plus pour l'exemple, heureusement que je n'y mets jamais les pieds. Tenez, je viens de trouver un machin qui va vous faire rêver, vous déclencher des crises d'achats compulsifs, c'est un oreiller-radio flottant. Textuel...
Bon, allons en cuisine préparer la sardine... avant de s'énerver pour pas grand chose en fait. Comme j'ai bon fond, et pas que musical, je vous propose de découvrir si vous ne le connaissez pas encore, un pianiste breton, Didier Squiban, mon voisin d'outre aber.
Sardines à l'huile de combava, souskaï de mangue sable
Ingrédients
- filets de sardines
- gros sel
- huile neutre (colza ...)
- fruits et feuilles de combava
- gingembre frais
- piment rouge frais
- mangue sable à peine mure
- un demi citron jaune
- un demi citron vert
- ail
- sel fin
- poivre noir
La mangue sable est une variété de ce fruit spécialement douce, il faut la choisir rendue à peine à maturité. J'ai choisi cette mangue au lieu des plus classiques manques vertes douces ou acidulées, car j'ai imaginé que sa saveur serait très adaptée à cette recette iodée aux parfums de combava.
Ce dernier se trouve désormais à peu près dans toutes les épiceries exotiques, voire parfois dans le rayon spécialisé des grandes surfaces. Quant aux feuilles, on les trouve congelées dans les magasins asiatiques.
Recette
La veille : Préparez l'huile au combava. Dans une casserole, rapez le zeste de trois combavas, coupez les fruits en quatre et mettez les également dans la casserole. Ajoutez une phalange de gingembre frais épluché et coupé en rondelles, et un ou deux piments rouges thaï. Versez 25 cl d'huile environ, faites chauffer à la limite de l'ébullition, puis coupez le feu et laisser macérer 24 heures. Passez ensuite dans une passoire fine.
Deux heures avant : Placez les sardines entre deux couches de gros sel, une fois levées en filets, bien lavés et séchés. Prévoyez deux heures pour de petits filets, mais vous pouvez aller jusqu'à trois ou quatre heures en fonction de la taille des filets ou de votre aversion à un aspect trop cru du poisson.
Une heure avant : Occupez vous du souskaï. Pelez et coupez la manque en petits cubes. Assaisonnez la avec le jus des citrons, du sel fin, une gousse d'ail (pelée et dégermée) et un ou deux piments rouge thaï (débarassés de leurs graines et parois blanches) coupés en tous petits dés. Salez.
Pour le dressage : Lavez soigneusement les filets de sardines pour les débarasser du sel, puis épongez les. Placez les dans un saladier où vous les mélangerez avec de l'huile au combava et un peu de poivre noir. Elles peuvent y mariner un peu sans inconvénient, au contraire.
Egouttez le souskaï, placez en un petit palet au centre d'une assiette à l'aide d'un cercle. Disposez ensuite les sardines comme vous le pouvez, et arrosez d'un discret filet d'huile au combava.
Comme souvent, nous étions trois à tester ce nouveau plat, ma femme, ma fille et moi. La première, très réticente au poisson cru, sauf le saumon et le thon rouge (soupir), n'a pas trouvé les sardines suffisamment cuites au sel. La seconde a bien aimé les sardines au combava, mais les mangues ... "Papa, tu sais bien que ce n'est pas mon fruit préféré". Ce qui en clair signifie qu'elle n'aime pas du tout. "Oui ma fille, mais je pensais qu'en version salée, çà passerait bien".
Pour ma part j'ai bien aimé l'association, mais je comprends que la mangue puisse surprendre avec la sardine au sel, en ce cas, je ne saurais trop vous conseiller de faire votre souskaï avec des dés de jeune courgette crue, c'est un délice!
J'ai servi là-dessus un blanc du Domaine de l'Ancestra, un Macon dont l'étiquette prétend fièrement que c'est un "Vin voilé pour terroiriste". Surement le seul vin un peu oxydé que ma femme tolère, ouf ...car il était vraiment à sa place aux côtés de ce plat aux saveurs exotiques, fortes et complexes.