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Cuisine de la mer
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6 avril 2007

Carpaccio de saumon à l'aneth, salicorne et asperges

Dans cette recette apparaît la salicorne, connue pour être une plante des marais salants, ce qui est exact, mais incomplet, on en trouve sur les rivages où elle signe de propreté de l'eau, elle refuse en effet de pousser dans les endroits pollués. C'est donc avec un grand plaisir que j'en ramasse dans mes abers.

Sans être vraiment une herbe de prés salés, elle s'en approche. Je vous ai déjà presque tout raconté sur le saumon, et en cette veille de Pâques, où presque tout le monde va se ruer sur l'agneau (soupir), la moindre des choses pour ce blog marin est de vous donner quelques indications sur les prés salés, lieu d'élevage d'excellence pour les moutons.

Les prés salés (Delenda Carthago est)

Après avoir détruit Carthage, les armées romaines semèrent du sel sur les terres encore fumantes de la cité, afin que rien ne repoussât après leur passage. Heureusement, l'herbe revint, et les troupeaux purent paître avec délectation une pâture bien relevée, qui donnait  bon goût à la viande, un slurp punique avait-on coutume de dire à l'époque. Si bien que de grandes caravanes de sel se mirent à traverser l'Afrique, afin que les éleveurs puissent faire pousser de l'herbe salée dans leurs prés.

Il fallut attendre les Croisades pour que ce délice parvienne en Bretagne, lorsque le preux chevalier Salaun de Salamanque revint dans son fief près du Mont-Saint-Michel, où rien ne subsistait, sinon quelques vaches faméliques, qui donnaient du lait salé permettant l'élaboration d'un fameux beurre, dont la tradition s'est perpétuée non loin de là, à Saint-Malo. En Terre Sainte, il avait goûté au méchoui de prés salés, et s'imaginait qu'avec autant de mer devant chez lui, il pourrait aisément acclimater la méthode.

Commença alors pour ses serfs un travail pénible. Il leur fallait en effet, deux fois par jour, attendre la marée basse pour planter de l'herbe à pâturer sur les étendues provisoirement découvertes. Travail des plus dangereux, car la mer dans cette contrée, remonte à la vitesse d'un cheval au galop (ce dernier point n'ayant par ailleurs rien à voir avec notre sujet, personne n'ayant longtemps poursuivi l'idée d'élever du cheval de prés salés).

Ce fut un franc succès, et les envieux ne tardèrent pas à se manifester, c'est de cette époque épique que date l'ardente rivalité entre bretons et normands à propos de la souveraineté sur le Mont Saint Michel (et de laquelle je me moque bien, car j'habite 250 km plus à l'ouest... et les canadiens n'ont par ailleurs pas encore eu l'idée de nous contester Ouessant ou Molène).

MSM

(Crédit Photo)

Depuis lors, les moutons du Mont-Saint-Michel ont fait souche sur toutes les prairies découvertes par la marée. Cela ne va pas sans quelques problèmes de cohabitation avec certaines espèces marines, comme l'oursin qui broute les mêmes herbiers, et gêne considérablement les ovins. Certains oursins vont même jusqu'à se faire friser les piquants, et à se les teindre, pour se dissimuler habilement parmi les moutons.

Cela ne va pas non plus sans risque : Les jours de grandes tempêtes, des troupeaux entiers sont emportés au large par la mer déchaînée. C'est alors un spectacle bien bel et étrange de voir des moutons sur la mer, éparpillés au gré de la houle. Pour ramener au bercail ces brebis perdues les bergers nautiques utilisent une sorte de gaffe, nommée la houlette et bien adaptée aux mers houleuses qui moutonnent.

Carpaccio de saumon à l'aneth, salicorne et asperges

Lorsque mon poissonnier affiche sur une étiquette "Saumon bio des Shetlands", me vient immédiatement l'envie le consommer cru, ce poisson est une vraie merveille. Et sans arrière pensée. L'une des qualité du poisson d'élevage, et peut-être même la principale, est de ne pas être porteur d'anisakis, car les contôles vétérinaires avant commercialisation sont normalement très stricts.  L'anisakis est un parasite qui se loge dans les viscères de certains poissons, et peut parfois provoquer des ulcères chez l'homme s'il est ingéré, il y a même quelques cas mortels chaque année, beaucoup plus au Japon qu'en France, mais avec la grande vogue des sushis, les cas se multiplient un peu partout.

Il n'y a que deux façons de les tuer, soit par la cuisson à 70°, soit par la congélation, au moins de 24 heures à - 20°, mieux de 72 heures. Dans certains pays, la commercialion de poissons destinés à être mangés crus, marinés ou semi-cuits est soumise à congélation obligatoire, comme au Canada et je crois en Suisse depuis janvier dernier, sauf à prouver que le poisson vient d'une zone de pêche non touchée par cette parasitose.

Après, chacun fait ce qu'il veut, j'avoue que je méprise un peu ce risque, pour deux raisons, d'une part parce que c'est une indisposition plutôt rare, et d'autre part, parce que ces parasites sont logés dans les viscères des poissons, lesquels on ne consomme pas. Le risque principal réside avec certaines espèces de poissons particulièrement porteuses de ces bébêtes, et lorsqu'ils sont vidés de façon malpropre, avec alors un risque de propagation à la chair. Alors, tant qu'il s'agit de beaux poissons frais (pas de ventres crevés!) que je vide moi même, et que je rince immédiatement à grande eau, je me sens en sécurité. Plus en sécurité même qu'avec les risques liés à une décongélation réalisée dans des conditions douteuses.

Ingrédients

- un morceau de filet de saumon avec la peau
- un petit bouquet d'aneth
- salicorne au vinaigre
- pointes d'asperges vertes
- huile d'olive
- poivre de la Jamaïque
- fleur de sel

Recette

Choisissez de préférence un morceau de filet coupé du côté de la queue, la chair y est plus serrée et moins grasse, l'impression en bouche n'en est que plus agréable. Par ailleurs, c'est une partie de l'animal qui n'est pas en contact avec les viscères. Parez le en ôtant les membranes blanches qui pourraient s'y trouver. Lavez-le très soigneusement et placez le au frigo afin qu'il se raffermisse, il sera plus facile à escaloper finement ensuite.

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Pendant ce temps-là, faites cuire les pointes d'asperges vertes brièvement dans de l'eau bouillante salée, à découvert; elles doivent rester fermes, même croquantes. Plongez-les dans de l'eau glacée pour arrêter la cuisson et obtenir une couleur vert vif.

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Utilisez un couteau à saumon (lequel se transforme complaisamment en couteau à jambon à l'occasion alors que l'inverse est moins évident) pour escaloper le filet de saumon, le fait d'avoir laissé la peau facilite grandement le travail. Tout le monde le sait désormais, on escalope un filet de poisson toujours avec le tranchant de la lame tourné vers la queue. Assaisonner de poivre (ou piment) de la Jamaïque, ajoutez l'aneth et l'huile d'olive. Il ne faut pas mettre trop d'huile,  c'est un assaisonnement, pas une marinade! Laissez ainsi au frais une bonne heure.

Au moment de servir, disposez les asperges et la salicorne, saupoudrez de fleur de sel. On peut servir avec des quartiers de citron, je préfère sans, mais ma femme ne peut s'en passer, on ne va quand même pas se prendre la tête pour quelques gouttes de jus de citron, hein? La salicorne au vinaigre, soit vous l'achetez (sachez alors que vous avez pas mal de chances de manger de la salicorne cultivée en serre), soit vous la faites comme les cornichons, sans passer par la phase de dégorgement au sel, bien entendu.

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Je suis toujours un peu à cours d'idée lorsqu'il s'agit d'associer un vin avec ce plat. Cette fois, j'ai fait dans la facilité, avec le Muscadet de Joseph Landron. Ses notes herbacées et très aromatiques s'accommodent bien de l'aneth et des asperges, tandis que quatre années de cave lui ont donné la rondeur suffisante pour se complaire au gras du saumon et de l'huile d'olive.

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Par ailleurs, cette cuvée s'appelle "Hermine d'or", preuve s'il en était besoin, que comme Ouessant et le Mont Saint Michel, Nantes est bien en Bretagne.

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Commentaires
B
bonjour ,<br /> comment prépares-tu les salicornes ? <br /> merci pour la réponse et pour le site.
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J
Non seulement la recette m'intéresse car je raffole du saumon mais ... nous partons pour le Mont St Michel via Lyon et Paris le 25 mai prochain. J'ai réservé une chambre dans une ferme à moutons à 2,5 km du Mont que nous atteindrons par les herbus (conseil de la fermière). C'est pas chouette ça ! Je raconterai notre séjour sur le blog après le 03 juin. Nous passerons à St Malo et Cancale, bien évidement, ainsi qu'à St Coulitz ... <br /> Bon we
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M
Un peu en retard, mais il y a tant à lire et à découvrir sur ce site!!!<br /> Dommage que je ne l'ai pas lue plus tôt, mais je vais la mettre de côté pour l'année prochaine, à la saison des asperges sauvages (sur les dunes de Tréguenec elles sont succulentes).<br /> Bises
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T
Alors là cette recette doit être à tomber ! L'association des salicornes (nous on est bien servi ! Tout proche des marais salants guérandais !!) Et puis le petit blanc nantais ! Maman serait contente (famille native de Nantes) !!<br /> Quel beau mariage ! Reste plus qu'à déguster ! <br /> Merci de nous faire saliver avec tant de professionalisme !<br /> Bises<br /> TiteZa
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B
Il y a 3 ans, j'ai mangé des suchis et j'ai été victime de l'anisakis. J'ai perdu 5 kilos en 1 semaine de souffrance et j'ai vraiment eu du mal à me remettre. Attention, il y a beaucoup plus de cas en france car seuls sont enregistrés les cas signalés auprès des organismes de santé public et le mien qui pourtant a été détecté à l'hopital ne l'a pas été. Il m'a fallut plus de 2 ans pour remanger du poisson cru alors que j'aime vraiment là et encore je n'en prend jamais dans les restaurants. Quand je le prépare moi même je laisse le poisson 2 heures au congélo et je prend une loupe pour vérifier, il parait que les vers se voient. Ta recette me tente vraiement, j'ai gouté des salicornes la semaine dernière et je suis conquise. Bon vent
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