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Cuisine de la mer
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4 octobre 2015

Tataki de ventrèche de thon rouge de Méditerranée, poire, piments verts, et fleur de sel à la lie de vin

Ceux d’entre vous qui suivent la page Facebook de Cuisine de la Mer savent que j’y poste régulièrement des informations sur l’état des ressources halieutiques, pour autant qu’elles ne proviennent pas de lobbies mal intentionnés, ou de militants la plupart du temps excessifs, et n’y connaissant pas grand-chose.

Il y a peu encore, le thon rouge de Méditerranée était dans une situation périlleuse, à cause de la surpêche aux méthodes industrielles et du prélèvement de juvéniles pour les fermes d’engraissement. Les quotas de pêches européens, toujours décriés selon que certains les trouvent trop restrictifs ou trop laxistes, ont fini par produire de l’effet, et aujourd’hui, on note une progression de la population de thons en Méditerranée.

Certes, il n’y a pas de quoi cesser de faire attention et s’abattre dessus comme la vérole sur le clergé de Basse-Bretagne au Moyen-Age, le monde ne se refait pas en un jour, la ressource peut à nouveau décliner, il y a du braconnage, et quelques gros petits malins ont trouvé commode de faire immatriculer leurs bateaux dans des pays ne faisant pas partie de l’Europe et donc non soumis aux quotas. Rien n’est tataki pour l’éternité.

thonrouge

Ce préliminaire a été écrit uniquement pour éviter aux lanceurs d’alertes a posteriori, confortablement assis devant leur poste de télévision décérébrant, la tablette ou le téléphone pommé à la main. Cela-dit, je ne me fais aucune illusion, contrôler la source d’une information (lIfremer, Greenpeace et WWF en ce qui concerne le thon rouge ci-dessus) est bien moins amusant que de hurler avec les loups ou de se tripoter la chouette autour de complots imaginaires.

Donc je mange avec du thon rouge, et avec peu d’ingrédients pour qu’il soit servi le plus naturellement possible, simplement mis en valeur par quelques touches de saveurs complémentaires. Très peu d’ingrédients, et sans me sentir obligé de citer les ingrédients que je n’y mets pas.

Désormais, lorsqu’on lit le titre d’une recette, on en sait plus sur ce qu’elle ne contient pas, que sur les ingrédients qu’on va cuisiner. 

La mode du « SANS » bat en effet son plein, on agite le petit fanion de son comportement alimentaire comme si voulait se donner en exemple, et culpabiliser ceux qui se contentent de manger comme ils en ont envie sans qu’on les enquiquine.

Les fameux hashtags qui fleurissent sur les réseaux sociaux, à ce point qu’on se demande si quelques-uns savent encore parler sans faire précéder chaque mot par un dièse, se dressent aussi comme des barricades dans nos assiettes, passe encore quand le sans tombe sous le sens comme pour le "sans pesticide" ou autre poison, pour les vraies intolérances ou dangereuses allergies come le "sans arachides" ou le "sans gluten", pourquoi pas le "sans sucre" si on a des problèmes de diabète ou le "sans sel" si on a une tension artérielle stratosphérique. 

Je suis moins enclin à accepter le débat sur la viande, et donc le poisson, l'homme est une espèce omnivore, et c'est même l'une des raisons de son évolution fulgurante par rapport aux animaux, pas la seule évidemment, sinon les porcs et les poules seraient également les maîtres du monde. 

Qu'on ne veuille pas manger de viande, ou certaines viandes comme le porc ou le boeuf, ou au contraire se goinfrer de cochon le vendredi, c'est une question de sensibilité, de philosophie ou de religion,  que je respecte bien entendu, tant que tous ces braves gens ne se mettent pas en tête de penser à ma place, que je vivrai mieux si je n'en mangeais pas, voire que je fais partie du complot mondial contre la planète, avec Nutella, Nestlé et Monsanto dans le rôle de l'axe du Mal Absolu.  Bref, mangez ce qui vous plait, faites-vous plaisir, mais ne gâchez pas le mien.

Je sais très bien que certains végétaux contiennent beaucoup de protéines et de trucs épatants pour la santé, que l'élevage intensif peut s'avérer désastreux, et qu'il faut veiller sur le peu de monde sauvage qui nous reste, comme sur la prunelle des yeux, sans avoir besoin de bonnes âmes qui le répètent à l'envi pour l'intense satisfaction de leurs followers béats. 

diese

Ces choses étant dites, j'ai l'honneur de vous informer que j'ai un très bon fournisseur de sel, un paludier de Guérande indépendant, Lionel Charteau. Le sel et la fleur de sel qu'il retire de ses marais salants est d'une qualité rarement égalée, les grands chefs de cuisine français ne s'y trompent pas, puisqu'il fournit un nombre toujours croissant d'entre-eux. Ceux qui suivent les émissions de télé-réalité où il est question de cuisine le savent, la qualité de l'assaisonnement est l'un des premiers critères évoqué par les jurés aussi enflés qu'une aérophagie de grenouille. 

Je suis très longtemps resté réfractaire aux sels et encore plus aux fleurs de sel aromatisés, mais je dois dire que celles mises au point par Lionel et son épouse Françoise ont eu raison de mes réticences. Le sel aux algues, aux herbes de provinpimpin ou même le gomasio, m'ont toujours laissé de marbre. Dans la gamme des fleurs de sel de la Maison Charteau, certaines ne me conviennent pas, comme celle au piment d'Espelette, car j'ai ma religion sur le sel et le piment : plus on met de piment et moins un plat a besoin d'être salé, notamment quand il s'agit de piment d'Espelette, qui est déjà un puissant exhauteur de goût.

Je suis par contre tombé sous le charme de celle au citron et au gingembre merveilleuse sur les viandes blanches ou le poisson cru, ou celle aux poivres, qui est un monument de puisance et d'arôme. La gamme est beaucoup plus large, il y en a aux algues, aux aromates, à la vanille, je ne suis pas là pour tenir un catalogue. De même que ceux qui veulent s'en procurer recherchent l'un des revendeurs sur internet, ce ne sont pas les Pages Jaunes ici. Espérons toutefois qu'ils mettent rapidement en oeuvre leur propre boutique en ligne. 

fleur-sel-guerande-sur-lie-charteau

Cet été, une amie qui croisait dans les parages est passée à leur boutique, et Lionel lui a demandé de me prendre la fleur de sel à la lie de vin et lorsque je l'ai goûtée pour la première fois, comme ça du bout de l'index, je me suis dit que c'était un assaisonnement vraiment diabolique, riche en umami, à en reléguer le vulgaire glutamate de sodium au rang de poudre insipide. Le mélange contient 10% de lie de vin, et est très légèrement relevé de genièvre. 

sel

J'ai commencé à l'utiliser sur une épaule d'agneau de prés salé, simplement rôtie au four avec un peu de beurre et d'échalote, c'était parfait. Et puis Lionel avec lequel j'ai dîné lors d'une de ses tournées de livraison dans les restaurants parisiens (parce le coût du transport pour une matière peu chère et lourde comme le sel, bonjour la facture), m'a dit que je devrais essayer sur du thon rouge. Alors bon... 

Tataki de ventrèche de thon rouge de Méditerranée, poire, piments verts, et fleur de sel à la lie de vin

Ingrédients

- deux pavés de 200g de ventrèche de thon rouge taillés en longueur
- une poire Doyenné du Comice encore ferme
- six piments verts de varité Padron ou équivalent, piquants si vous aimez
- fleur de sel à la lie de vin

Voilà qui suffit largement pour deux personnes.

La ventrèche de thon n'est pas indispensable, n'importe quel morceau de filet peut faire l'affaire pour cette recette, mais je trouve que cette partie du poisson est particulièrement bonne, à la fois ferme et fondante ; lorsque d'autres amateurs ne s'en sont pas emparés avant moi, c'est celle que je privilégie pour les grillades. Elle est un peut trop grasse pour les plats en sauce.

Cette recette s'effectue sur une plancha (ou un teppanyaki) disposant d'au moins de deux zones de chaleurs, l'une qui va rester modérée, l'autre qu'on va vivement chauffer. 

Pour être franc, ce n'est pas la méthode complète du tataki que j'applique, certes la cuisson est la même, mais ensuite, dans la recette japonaise, le poisson est aussitôt trempé dans l'eau glacée pour arrêter la cuisson, et mis à mariner, généralement dans un mélange de vinaigre et de soja, mais il y a des variantes. Cela dit, ça ne fait pas grossir, tataki ne profite jamais. 

Recette

Pelez la poire, coupez-la en huit quartiers, enlevez les parties coriaces et les pépins. Lavez les piments.

Otez la peau du thon, en laissant une mince couche de graisse.

Portez votre plancha à température modéré sur une partie, et à forte température sur l'autre.

Cuisez les quartiers de poire et les piments sur la partie à chaleur modérée, jusqu'à coloration. 

Cuisez vivement le pavé de thon sur chaque face, en conservant le centre cru. Commencez par la face d'où vous avez enlevé la peau, pour que la graisse fonde et empêche le poisson de coller à la plaque. Si vous avez bien réglé vos feux, le temps cuisson du poisson est égal à celui de la garniture.

Coupez le pavé de poisson en tranches, et dressez en assiette chaude avec quatre tranches de poire et trois piments. Saupoudrez de fleur de sel à la lie de vin. 

Tataki1

Bref, un bel accord entre quatre produits simples et de qualité, la douceur de la poire compensant l'ardeur du piment, les deux équilibrant le gras et la fadeur du thon cru à coeur, le tout terriblement excité et relevé par la fleur de sel. 

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Commentaires
S
Merci pour cet article très intéressant.
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J
Très intéressant.
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C
Hahaha la vision d'un monde dominé par les poules et les cochons fait ma joie :) Merci pour cette magnifique fleur de sel, je vais l'essayer ce soir sur quelque chose de complètement différent : des andouillettes grillées. Car oui, SCOOP, depuis cet été les andouillettes à la fraise de veau sont de nouveau autorisées, alors voila ! #avecandouillette #avecgras #avecveau #avecvous :)
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K
Ouah la en plus c'est beau, très curieuse de goûter ces sels parfumés. Je peux ptet essayer de me lancer, j'ai un pote vigneron pour la lie.... Merci en tout cas pour cette belle association!
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J
Merci de toutes ces précisions sur le thon.<br /> <br /> à propos pouvez-vous me dire pourquoi on trouve du thon blanc (albacore), voire du thon rouge mais jamais du thon germon (le meilleur selon moi) sur les étals des poissonniers, sauf en conserve bien entendu..
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