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Cuisine de la mer
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9 septembre 2011

Ormeaux poêlés, purée de cocos à la vanille et combava

Vendredi 9 septembre au soir, l'une des plus anciennes émissions de reportage dédiée à la mer, Thalassa sur FR3, consacre son numéro de rentrée à mon coin des abers, avec trois reportages, qui mettent en valeur tant les paysages que les hommes qui vivent et oeuvrent sur cette terre salée.

L'aber Wrac'h est particulièrement mis en valeur dans le troisième reportage, avec quelques-uns de mes copains inside, à commencer par Sylvain Huchette, fondateur de France Haliothis, qui fait naître et élève en pleine mer les ormeaux qui ont servi à la recette ci-dessous. Voici les extraits de présentation des reportages, pris sur le site de l'émission, que vous pourrez regarder en postcast si vous ne recevez pas cette chaîne ou que votre emploi du temps ne vous permet pas d'être ce soir devant le poste.  Contrairement à ce qui était prévu, le reportage à l'Auberge des Abers chez mon ami Jean-Luc L'Hourre a été supprimé au dernier moment, au profit de celui sur les vues aériennes, vraiment dommage, mais ne boudons pas notre plaisir.

Entre ciel et terre
Une reportage de Gil Kebaïli, Norbert Evangelista, Bas Vandenbranden (durée 8')
Une production Grand Angle

Au nord de la pointe Bretagne, la région des Abers prend toute sa dimension vue du ciel. Une côte déchiquetée, battue par les vagues, des rochers rosis  de granit, et comme sentinelle d’entrée, un phare posé sur une île déserte, le phare de l’île vierge… Le décor du plus grand des abers, l’aber Wrach’,  est planté. Nous sommes sur la côte des légendes, au cœur du pays Pagan. Le survoler c’est se souvenir  des histoires qu’on se raconte depuis toujours et qui  mettent en scène le diable et les anges, les sorcières et les fées. S’y poser, c’est rencontrer quelques amoureux de ce coin sauvage avec qui l’on partage une navigation,  ou le temps d’un déchargement, la découverte d’un port minuscule  caché  au fond de l’estuaire.

Bel Espoir
Un reportage de Béatrice Berge et Nejma Berder (durée 13')
Une production France 3 - Thalassa

Le Bel Espoir est beau. Ce qu’il fait est beau. Et les gens qui le font sont beaux.

Cela fait quarante ans que le 3 mâts goélette embarque des jeunes et des moins jeunes, avec ou sans problème, le temps de traverser l’Atlantique ou des passes difficiles. C’est sans doute l’un des bateaux français qui navigue le plus : 20.000 milles par an, l’équivalent d’un tour du monde ; il a aujourd’hui plus de 800 000 milles au compteur…
Le Bel Espoir, c’est d’abord l’histoire d’un homme. Michel Jaouen. Le père Jaouen. Né à Ouessant au milieu de 15 frères et sœurs il y a plus de 90 ans, ce jésuite, marin salé et fort en gueule, sera le Pape de la réinsertion.
Pendant 25 ans, Michel est aumônier à la prison de Fresnes. S’il achète ce voilier de 38 mètres en 1968 (construit au Danemark en 1944), c’est, au départ, pour emmener en vacances des jeunes sortis de prison. Puis ce seront aussi des drogués et des alcooliques en désintoxication, mélangés avec Monsieur et Madame Tout Le Monde : pour Jaouen, le brassage est la clé de la réinsertion sociale.

L’A.J.D., l’association des jeudis et dimanches, gère l’embarquement d’un petit millier de personnes chaque année à bord du Bel Espoir ou du Rara Avis, et propose aux jeunes intéressés par les métiers de la mer une initiation et formation dans son chantier naval au bord de l’aber Wrac’h.

Depuis 60 ans, des milliers de personnes ont été remises sur les rails par Jaouen et l’AJD.

Rien de tel, quand on est en mal de repère où que l’on veut s’élargir l’horizon, que de prendre la mer sur un beau bateau qui fait de belles choses avec de belles gens…


Au fil des Abers
Un reportage de Fabrice Caer, Patrick Méheut et Didier Gohel (durée 12'15)
Une production Bleu Iroise

Il faut aimer le grand air et les changements brutaux pour vivre dans ce paysage à la fois terrestre et maritime. Au pays des abers le vent et la mer façonnent ceux qui ont choisi de vivre là. Pour découvrir ce labyrinthe où la mer vient s’égarer au milieu des terres, nous avons rencontré  des habitants qui le  sillonnent toute l’année. Moniteur de kayak, Gwendall en connait l’histoire et les moindres recoins. Jacques Caraes, l’enfant du pays a déjà bouclé 4 tours du monde sur des voiliers de course ; mais c’est toujours à l’Aber Wrach, qu’il revient poser son sac. Sylvain Huchette est venu là en raison de la qualité des eaux et de l’abondance des algues. Docteur en biologie marine, il a développé un élevage d’ormeaux. Trois personnages, trois atmosphères et un même goût pour ce lieu étrange où même les cailloux portent des noms évocateurs.

belespoir
(Photo : Ouest-France)

 Il sera donc question d'ormeaux, l'un de mes coquillages préféré, qui se fait rare à l'état sauvage, au point que des mesures de restriction de pêche sont prises. Il est notamment interdit de le pêcher à la saison de reproduction (fixée du 1er juin au 30 août), la taille minimum est de 9 cm, et chaque pêcheur ne peut prélever que 20 ormeaux par marée (en Bretagne) et ne pas pêcher plus de 15 jours par an. Il doit s'agir d'une vraie pêche à pieds, qui ne doivent pas quitter le sol, de même que la tête ne doit pas être immergée et il est interdit de décoquiller sur place.

Cela concerne les pêcheurs amateurs, et non les pêcheurs professionnels titulaires de licences et qui peuvent capturer un certain quota en plongée. Les restrictions pour les amateurs risquent bien de s'amplifier, pour revenir aux dates traditionnelles de pêche qu'observaient les anciens, à savoir les mois d'hiver. L'ormeau en effet se rapproche des côtes au fur et à mesure que la mer se refroidit, les plus belles pêches se font en février et mars.

Contrairement à deux autres gastéropodes marins comestibles qui sont essentiellement sédentaires, le bigorneau et la patelle, l'ormeau est voyageur... Ne croyez pas qu'il se déplace lentement, ci-dessous j'ai filmé ceux que j'ai cuisiné cet été (oui, les ormeaux d'élevage de Sylvain Huchette qui sont délicieux et ne donnent pas de remord quant à la conservation de la ressource), vous constaterez la vivacité de la bestiole.


Ormeau en fuite

Je vous ai déjà présenté des ormeaux simplement poêlés au beurre, la meilleure façon de les déguster, pour ce billet, j'ai souhaité mettre l'accent sur un accompagnement que j'ai mis au point cet été,  je vous le conseille des deux nageoires, il change bien des médiocrités ci-dessous :

 

Grandeur et décadence de la garniture de légumes

 Pendant des années, je me suis énervé sur les garnitures ou accompagnement, appelez ça comme vous voulez, qu'on présentait dans les restaurants, singulièrement autour du poisson. Dans le meilleur des cas, on avait le droit à un peu de riz nature ou à quelques pommes de terre à la vapeur, plus ou moins beurrés selon les contrées.

 

 coco_paimpol

Jusqu'à récemment encore, dans les restaurants de Bretagne se voulant un peu élaborés (je ne parle pas de restaurants gastronomiques), tous les poissons et les viandes étaient accompagnés de ce qu'il est convenu d'appeler une ronde de légumes à la bretonne (mais en Normandie, elle doit être "à la normande", etc...), toujours la même quelle que soit la saison ou la recette... je ne sais pas si je me souviendrai de tous, mais du recoin sombre de mon cerveau où je range mes pires souvenirs traumatiques, je peux extraire :

- Le petit fagot de haricots vert, entouré d'une bande de lard fumé bien grasse, parfois à peine dégelé à l'intérieur.
- Les carottes imitations vichy, un petit tas de rondelles avec du beurre et du persil. Aussi molles qu'une motte de beurre dans un solarium. 
- La pommes de terre duchesse, c'est à dire un petit tas de purée déposé à la poche à douille pour les faire ressembler à une glace italienne, brunis au four, et qui arrivaient quasiment froids à table. Sèches, archi-sèches, les patates de la duchesse...
- Plus tendance, le bout de gratin dauphinois ou comtois qui s'écoule lamentablement, tel un camembert échoué sur le Vieux-Port.
- La demi-tomate non mondée, passée rapidement au four avec une belle couche de chapelure, et dont l'eau et les graines s'étalaient lamentablement dans l'assiette, telle une crue mal tassée.

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 - Le chapeau de champignon de Paris fut très en vogue aussi, farci du pied haché et de chair à saucisse. Comment font-ils pour que le champignon soit à peine cuit et la farce de la consistance d'une crotte de bique au Sahel ?
- Parfois aussi, quelques rondelles de courgettes, encore plus molles que les carottes, et imbibée d'une huile d'olive de qualité douteuse.
- Les flageolets trop cuits, aussi pâteux que l'élocution de Johnny, toujours du flageolet, alors que la diversité des haricots produits en France est très importante. 

- La ridicule quenelle de riz, toujours trop salée, quelle idée de saler le riz.
- L'inévitable feston de pâte brisée toujours trop cuit et de forme très kitsch.
- Plus récemment, la julienne de légumes a fait une entrée en force, supplantant le panaché de purées qui nous a bien ennuyé un moment aussi (céleri, brocoli, haricots verts, carotte et j'en passe, en tas informes dans l'assiette).
- Le pire actuel est la mode de la garniture folklorique bretonne, où se côtoient l'artichaut, le chou-fleur, le coco de Paimpol et la pomme de terre... vous vous en tirez gonflé à blog, capable de neutraliser la fanfare montée de la Garde Républicaine.

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(J'ai galéré pour trouver ces illustrations sur le net, souvent je suis tombé
sur des photos de blogs avec des gens que je connais qui écrivent dedans)

 Je dois avouer que je n'ai pas toujours été au top sur mes accompagnements, j'ai souvent privilégié les pommes de terre et le riz, mais au moins, je n'ai jamais accompagné mes plats d'une foultitudes de légumes, jusque pour un effet déco-abondance. J'aime au contraire les accompagnements simples, ou alors multiples mais conçus pour constituer un tout, comme une ratatouille par exemple.

Je cuisine le coco de Paimpol depuis des années, je le mange chaud ou en salade, mais je l'avais rarement réduit en purée, je suis vraiment heureux de vous présenter le résultat.

 Ormeaux poêlés, purée de cocos à la vanille et combava

 Ingrédients

- ormeaux
- beurre
- sel
- poivre noir

Pour la purée

- 1,2 kg de cocos de Paimpol
- huile au combava (ou zeste)
- une gousse de vanille
- lait entier
- crème fraîche
- beurre
- sel
- poivre blanc

L'épicerie Roellinger m'a encore été précieuse, car il est difficile de trouver au bout de la Bretagne des combavas frais, et il est impossible de râper convenablement le zeste de ce fruit une fois congelé, j'en ai fait l'expérience. Pour la vanille, j'ai utilisé celle d'Ouganda, achetée également chez eux, elle s'adapte particulièrement bien à la cuisine salée, mais vous pouvez choisir une autre provenance... Cerise sur le gâteau, j'ai salé ma purée avec leur fleur de sel parfumée au combava et à la vanille, offerte par une chère amie blogueuse, mais vous n'y êtes pas contraints !

Recette

Pour les ormeaux, vous devez vous y prendre la veille. Dégagez-les de leur coquille d'abord en coupant l'attache avec une couteau, puis en vous aidant d'une cuiller pour extraire le poisson en épousant bien la forme de la coquille.

Ôtez les viscères et la tête, entaillez un peu les barbes (je n'ébarbe pas, elles sont savoureuses). Placez-les (un par un) dans un linge, puis tapez la bosse coriace de quelques coup de maillet pas trop violents, afin de l'attendrir. J'entends assez régulièrement  que certains préfèrent les masser pour parvenir au même résultat, j'ai essayé, ce n'est pas très probant et on y passe beaucoup de temps, or j'ai mieux à faire que masser des coquillages morts...

Lavez et séchez-les, puis réservez-les au frais jusqu'au lendemain dans une assiette filmée. Ainsi, ils seront un peu "rassis", ce qui améliore leur saveur et leur tendreté. Je lis parfois aussi que certains les conservent une nuit au frigo avant de les dé-coquiller, pensant obtenir le même résultat. Je pense qu'ils ont eux-mêmes déjà fait l'expérience, si il s'agit d'ormeaux bien frais, ils seront encore vivants le lendemain, et leur chair absolument pas rassise. (Je n'en ai pas encore croisé qui les font jeuner comme les escargots, mais ça ne saurait tarder).

Pour la purée, il faut commencer par écosser les haricots (vous avez intérêt d'ailleurs à le faire dès le retour du marché, contrairement à ce qu'on pourrait croire, le coco de Paimpol frais se conserve mieux en dehors de sa gousse qui a tendance à moisir rapidement).

Mettez-les à cuire départ eau froide, avec quelques aromates de votre choix, mais ne salez pas, car cela fait durcir le tégument des haricots, il est bien plus malin de saler la purée. (Toutefois si vous devez consommer les cocos entiers, salez à mi-cuisson).

Laissez-les cuire à feu moyen jusqu'à ce qu'ils parviennent à ce fondant caractéristique de tous les haricots blancs, et passez les encore chauds au presse-purée. Oui, le bon vieux truc à manivelle et pattes d'engin spatial.

Délayez la pulpe obtenue avec du lait chaud, jusqu'à une consistance presque crémeuse, que vous finirez avec une cuiller à soupe de crème fraîche épaisse.

Fendez la gousse de vanille, prélevez les graines que vous incorporez à la purée. Si comme moi vous n'avez pas de sucre vanillé en construction dans un bocal, mettez-y aussi les gousses, qui infuseront jusqu'au moment de servir. Ajouter de l'huile de combava (ou du zeste) selon votre goût, mais sans excès. Salez et poivrez.

 Ormcoco

 

Vous devez préparer cette purée à l'avance (au moins  et la réchauffer au dernier moment, pour peu que vous la tamponniez encore chaude avec un morceau de beurre pour éviter qu'une pellicule sèche ne se forme en surface. En effet, il faut laisser le temps à la vanille d'exhaler son parfum. Au moment de servir, incorporez une petite noix de beurre cru.

J'ai également présenté cette purée en accompagnement de homard grillé comme ici, c'était génial...

Ormcoco1

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Commentaires
P
@ Alhya, je me repends, mais j'ai un autre gourou en cuisine, qui d'ailleurs ne publie pas beaucoup plus que toi depuis un moment ;-))<br /> @ Marie-Pierre, je ne sais pas compter en fait, c'est pour cela que je ne me lance pas dans le patisserie !<br /> @ Hélène : C'est un cousin de l'escargot, puisque c'est un gastéropode marin... Oui, c'est assez hors de prix, mais d'un autre côté, il y a très peu de perte, comparé à la plupart des autres coquillages, sa coquille est très légère et il y a très peu de viscères.<br /> @ Colibri : A force de les cuisiner toujours de la même façon, et de les écrire ici, j'en oublie l'essentiel : Dans du beurre Mousseux, entre une à deux minutes sur chaque face, en fonction du calibre.<br /> @ Claire, oui je connais bien France Haliothis, son fondateur Sylvain Huchette est devenu un copain. Tu as pu le voir si tu as regardé Thalassa il y a dix jours. Le calibre que je cuisine correspond sur leur site aux plus gros (ceux qu'il fournit au Georges V par exemple). <br /> @ Jojo, commande l'huile au combava de Roellinger, pour une purée, c'est parfait !
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N
Je rêve de goûter aux ormeaux, cette recette est très classe. J'ose imaginer le goût de cette purée de coco à la vanille et combava. Dommage, je n'ai encore jamais trouver de combava par ici pffffff<br /> bises<br /> jojo
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M
Euh,Patrick, je crois que tu ne dois pas t'inquiéter de l'usure de ta microplane. Fais plutôt gaffe à tes doigts !
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C
Cela fait un moment que j'ai envie de commander des petits ormeaux chez France Haliotis. Mon père a une recette d'ormeaux aux girolles qui devrait bien coller avec ces mini formats. Tu les a goûtés j'imagine ?
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C
Une fois battu et rassis, combien de temps cuit-on les ormeaux à la poêle ? Il m'arrive souvent d'en manger en ragoût chez les amis pêcheurs, et ils m'en donnent quelquefois à cuisiner moi-même, c'est assurément poêlés au beurre que je les préfère, mais j'ai encore des progrès à faire question temps de cuisson ! Pour les combavas, comme Gracianne, j'en ai toujours dans le congel et les rape très bien ! Sinon j'utilise mon huile (recette sur mon blog)... Je me suis permis de faire un lien vers ton blog, à propos de la cuisson du tourteau. J'espère que tu n'y vois pas d'objection, sinon je retire !
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